Rapport de la Commission Participative mixte etterbeekoise sur les représentations du passé colonial belge dans l'espace public

Rapport sur les travaux de la Commission Participative Mixte

 

  1. Introduction


À la suite de la grande marche contre le racisme « Black Lives Matter » et la mise en place de la commission « décolonisation » au fédéral, le 29 juin 2020, le Conseil communal d’Etterbeek a adopté une motion instaurant une commission réunissant des habitants tirés au sort et des mandataires. Cette commission, dénommée « commission participative mixte » (CPM), a pour mission de se pencher sur les représentations du passé colonial belge dans l’espace public etterbeekois.

Cette motion a été votée à l’unanimité des conseillers communaux. Madame Mandaila, conseillère communale de l’opposition, a été désignée pour la présider.

L’objectif des travaux de cette commission est de permettre à la population de s’exprimer quant au maintien de références de l’histoire de la colonisation, leur contextualisation, leur éventuelle modification, et à améliorer la prise en compte et la connaissance de ces traces coloniales présentes sur le territoire communal.

En effet, le nombre d’artères portant des noms liés à l’époque coloniale et militaire est particulièrement important sur le territoire de la commune.

Après plusieurs mois d’auditions, de travaux, d’ateliers et d’échanges entre les différents membres de cette commission, lesquels ont reçu l’appui de deux historiens et d’un prestataire externe spécialisé en participation citoyenne, plusieurs recommandations ont été formulées dans le but d’apporter une série de clarifications relatives à l’histoire de notre territoire. Et ainsi de respecter les engagements pris par le Conseil communal d’Etterbeek, en vue d’œuvrer pour une commune plus inclusive et plus ouverte sur le monde. 


 

Concrètement, le présent rapport reviendra sur les travaux de cette CPM et évoquera tour à tour les conditions liées à sa mise en place, sa composition, sa méthodologie et les différentes interventions qui ont eu lieu tout au long du parcours. Sans oublier les recommandations formulées au terme des séances qui se sont tenues entre le 9 février 2022 et le 30 mai 2023. 

Soit un an de travail, avec un processus qui s’est voulu le plus démocratique possible, pour aboutir à cinq recommandations soumises au vote lors de la dernière réunion de la Commission. 

Pour répondre à un souci d’exhaustivité, les auteurs mettent à disposition l’ensemble des procès-verbaux en annexe du présent document.



 

  1. Mise en place de la Commission Participative Mixte



 

    1. Motion



 

En juin 2020, la Liste du Bourgmestre, ECOLO-GROEN et le PS-Vooruit déposent une motion pour la mise en place d’une commission participative mixte en vue d’une meilleure compréhension de l’histoire de la colonisation belge à travers ses représentations dans l’espace public communal.

 

L’histoire d’Etterbeek est en effet considérablement marquée par son passé colonial militaire. Le souvenir des Casernes Rolin et du Charroi ou encore de la Plaine des Manœuvres, maintenant occupées par l’ULB et la VUB, rappellent cette époque durant laquelle des milliers de militaires séjournaient à Etterbeek.



 

Etterbeek comprend une grande densité d’éléments patrimoniaux évoquant le fait colonial. A titre d’exemple : 26 rues portent un nom se rapportant à des faits et des personnalités liées au passé colonial belge, tant dans le cadre de la colonisation que pour des faits de guerre.



 

Aussi, la commission a pour mission de permettre à la population, dans un cadre participatif et démocratique, de s’exprimer sur ce qu’elle souhaite entre par exemple le maintien des traces de l’histoire de la colonisation, leur contextualisation, ou leur modification. 



 

Ses missions ont par ailleurs été définies comme suit :

« Identifier sur le territoire communal l’ensemble des références patrimoniales (monuments, statues, noms de rue, plaques commémoratives, etc.) liées à l’histoire de la colonisation belge en Afrique, notamment en s’appuyant sur les recherches et inventaires déjà établis par les services régionaux et fédéraux compétents, par les associations et les experts sur cette question ;

Entendre et recueillir les avis des représentants des organismes et associations reconnus pour leur connaissance et leur travail sur l’histoire coloniale et le devoir de mémoire, ainsi que les scientifiques proposés par les personnes-ressource ou une majorité des membres de la commission participative mixte en vue de participer au travail d’examen critique du passé colonial belge ;

Entendre et recueillir l’avis des membres du Collège des Bourgmestre et Echevins qui, dans leurs attributions, ont une ou plusieurs compétences qui intéressent directement ou indirectement le travail de la commission ;

Formuler sur base de ses travaux toute proposition et recommandation visant à améliorer la prise en compte et la connaissance de l’empreinte coloniale présente sur le territoire communal, notamment, à travers :

L’élaboration d’argumentaires historiques et pédagogiques permettant la contextualisation des éléments patrimoniaux liés au fait colonial présents sur l’espace public communal ;

Le maintien ou la modification de ces éléments ;

Le recours aux créations artistiques à proximité des œuvres d’art issues du colonialisme  ;

La réalisation d’un travail pédagogique proposé aux jeunes etterbeekois pour la mémoire coloniale dans un cadre plus large de lutte contre les discriminations » ;

Au terme de ses travaux, la commission participative mixte doit remettre un rapport contenant l’ensemble de ses propositions au Collège et au Conseil communal qui se chargeront de les approuver et d’en assurer la mise en œuvre effective. 



 

  1. Composition de la Commission 



 

Cette Commission Participative Mixte est composée de :

  • dix membres du Conseil communal selon une représentation proportionnelle, en application du système d’Hondt, entre les groupes qui composent le Conseil communal, conformément à l’article 120, alinéa 2 de la Nouvelle Loi Communale. Étant entendu que chaque groupe a droit à au moins un représentant au sein de la commission participative mixte. Les sièges étaient attribués de la manière suivante :

  • 4 membres de LB 

  • 3 membres Ecolo-Groen

  • 1 membre PS-Vooruit

  • 1 membre de Défi

  • 1 membre des Engagés

  • vingt membres tirés au sort, dans le respect de la législation concernant la protection des données personnelles, par le service désigné à cet effet par le Collège des bourgmestre et échevins, parmi ceux ayant remis leur candidature dans les 600 personnes à qui la lettre a été envoyée par tirage aléatoire. Le tirage au sort respecte autant que possible les trois principes :



 

Parité homme-femme ;

1/3 de personnes ayant moins de 35 ans 

Une représentativité des quartiers de la commune 



 

La Commission est accompagnée dans la préparation de ses travaux par des personnes ressources, en l’occurrence deux historiens choisis sur base des cv reçus et approuvés en Collège et qui composent le comité d’accompagnement sous la coordination de la fonctionnaire responsable de la participation citoyenne et la présidente de la CPM.



 

La première historienne est Chantal Kesteloot (Cegesoma/Archives de l’Etat), docteure en histoire contemporaine. Elle a été mandatée par la commune afin d’alimenter tout au long du processus la compréhension des membres de la commission, et ce à travers de multiples interventions et présentations. Spécialiste de l’odonymie et de la toponymie, elle a pu partager l’importance des noms de rues, que ce soit utilitaire ou symbolique et culturel, mais aussi historique. 

Le second, chercheur est Romain Landmeters (Université Saint-Louis - Bruxelles), doctorant en histoire contemporaine. Il mène des recherches en histoire de la colonisation et des migrations. Il s’intéresse depuis de nombreuses années à la question de l’enseignement de la colonisation. 

Enfin, il est important de noter que les membres du Collège des Bourgmestre et Echevins ont le statut d’observateurs permanents sans droit de vote.



 

  1. Retour sur la méthode relative à la composition du panel citoyen 


Un tirage au sort de 600 personnes a été réalisé par le service de la population. 

Parmi les 600 courriers envoyés, 26 personnes ont montré leur intérêt. 

20 d’entre elles ont été tirées au sort. Deux personnes n’entraient pas dans les conditions et les quatre autres ont été invitées à participer aux séances ouvertes au public. Elles étaient suppléantes en cas d’absence.

Au regard du tirage au sort réalisé, il n’a pas été possible de répondre parfaitement à l’ensemble des critères élaborés pour que la commission soit pleinement représentative de la population. Mais cela ne semble pas avoir nui à la qualité des débats.



 

2.4 Ordre du jour des différentes séances et approche utilisée pour établir les recommandations



 

Afin de bien baliser les discussions de la commission et d’informer les membres de façon adéquate, le comité d’accompagnement a proposé un agenda basé sur la structure suivante : 

  • Évoquer d’abord le contexte communal afin que les membres de la commission puissent se familiariser avec les concepts liés à l’élaboration de la CPM ;

  • Proposer une série d’auditions veillant à parfaire leur compréhension de l’objet de la commission ;

  • Évoquer des cas concrets à Etterbeek à partir d’une série d’archives collectées par les historiens et l’archiviste communal désigné pour travailler sur le projet «  Inclusion et représentation dans l’espace public » (IREP)1.

  • Favoriser la participation de chacun à travers la formule des ateliers en sous-groupe, ce qui a été permis grâce à la modération d’un prestataire externe spécialisé en participation citoyenne, Particitiz.

Tout au long du processus, un « cloud » a par ailleurs été créé pour alimenter les participants en documentation afin de compléter les différentes séances. Les membres de la CPM étaient également invités à y ajouter les ressources et documents qu’ils jugeaient pertinents. Ce que certains ont fait. 



 

    1. Le 9 février 2022 : séance introductive2



 

À la suite de la présentation des membres de la commission des différents intervenants, et de l’introduction du Bourgmestre, une remise en contexte des tenants et aboutissants de la mission fut réalisée par les deux historiens. Ces derniers en ont profité pour clarifier les concepts de toponymie et d’odonymie. 



 

  1. Le 19 avril 2022 : audition de deux premiers experts3 



 

Présentation par Mme Eline Mestdagh du travail réalisé dans le cadre de l’initiative citoyenne de Gand sur la décolonisation. Eline Mestdagh est historienne à l’UGent. Elle mène une thèse de doctorat à propos des cultures historiques conflictuelles dans le débat postcolonial belge. C’est d’abord en tant que citoyenne gantoise qu’elle s’est investie dans le groupe de travail de décolonisation de la Ville de Gand, qui a rapidement débordé les enjeux de la décolonisation de l’espace public pour se déployer vers une analyse systémique des questions de discrimination et d’injustice structurelle au sein d’une ville. Une démarche qui, de facto, a touché une grande partie de la population à travers une multiplication de conférences, ateliers, promenades, et débats. Et qui a permis d’inscrire les recommandations dans un spectre beaucoup plus large. Il y était non seulement question de politique active de lutte contre le racisme et d’éducation décoloniale permanente, mais aussi de gestion et d’aménagement de l’espace public, d’enseignement et de politique de la jeunesse, de culture (dont la figure de Père Fouettard), de représentation et de politique internationale. 

L’oratrice a évoqué les risques inhérents à une telle démarche : risque de se focaliser vers le passé alors qu’il convient d’orienter l’action vers le futur (à quoi doit ressembler Gand demain), risque de se limiter à des actions concrètes, visibles et donc rassurantes, au détriment d’une vision globale et donc évolutive. Et le risque de s’écarter de la richesse du processus lui-même qui a suscité une évolution des mentalités. C’est évidemment tout l’enjeu des dynamiques participatives correctement menées. Ce travail a conduit la ville à adopter un programme visant à « construire un avenir commun dans lequel nous construisons une ville inclusive dans laquelle chaque citoyen se sent reconnu et apprécié »

On voit donc ici l’intérêt d’une démarche initiée par un enjeu (la décolonisation) lié au passé qui aboutit à un projet inclusif tourné vers le futur. 


 

Présentation par Mme Yasmina Zian4 de l’état d’avancement du Groupe de travail sur la présence des symboles coloniaux dans l'espace public pour la Région de Bruxelles-Capitale. Madame Zian est chercheuse en histoire. Elle travaille sur l'histoire coloniale et ses conséquences dans notre société contemporaine, dont le traitement du débat sur la restitution des patrimoines culturels acquis pendant la période coloniale. Elle est rédactrice du rapport L'avenir des collections extra-européennes, commandité par la Fédération Wallonie-Bruxelles.. 



 

  1. Le 14 juin 2022 : Présentation des témoignages de l’époque coloniale à Etterbeek et mise en contexte de plusieurs cas dans la commune5



 

Après avoir présenté un panorama global des traces coloniales présentes à Etterbeek, les historiens ont rappelé que 26 rues sur 185 témoignent d’une empreinte coloniale et que le passé historique est très présent à Etterbeek. On y retrouve des traces des guerres mondiales, de l’époque coloniale, d’hommes politiques6, de personnalités ou communautés religieuses, etc. Ceci est très particulier, il n’y a pas d’équivalent à Bruxelles en termes de représentation du passé colonial. Ces noms d’artères ont été attribués en majorité durant l’entre-deux-guerres. En effet, la commune ayant connu à cette époque une forte croissance démographique, il a fallu créer des nouveaux quartiers et donc attribuer des noms aux nouvelles artères. Les justifications du Collège d’alors permettent de constater à quel point le contexte historique du moment détermine le choix des rues. Durant cette période-clé apparaissent les noms des personnages impliqués aussi bien dans la Première Guerre mondiale que dans la colonisation. La philosophie générale de l’époque se retrouve dans cette phrase tirée des échanges d’un Conseil communal du 14 décembre 1920 : « les administrations communales se doivent de reconnaître les mérites et les actions d’éclat de leurs concitoyens et d’aider ainsi à la glorification du pays ».

Un des cas emblématiques est la cité-jardin ou cité Coquilhat. Il s’agit d’un projet de création en 1923 d’un nouveau quartier composé de 92 logements sociaux et quadrillé par six nouvelles voiries. Toutes les rues dans ce lotissement ont un lien avec le Congo. Ainsi, « le Collège décide de donner aux voies publiques ouvertes dans la cité jardin, établie à proximité des casernes les dénominations suivantes [:] (20/9/1923)–rue Général Fivé –rue Lieutenant Jérôme Becker –rue Camille Coquilhat –rue Baron Dhanis –rue Lieutenant Lippens –rue Commandant Ponthier ». 

En ce qui concerne le quartier du Rinsdelle créé en janvier 1929, treize nouvelles voiries sont percées. Les dénominations proposées par le Collège portent sur la mémoire de la Première Guerre mondiale (9) et sur celle de la Colonie (4). 

La motivation est la suivante: « le Collège, désireux de rappeler les hauts faits de nos soldats au cours de la terrible guerre 1914-1918, ainsi que l’héroïsme et l’abnégation de nos colonisateurs et de nos missionnaires...». D’autres motivations et facteurs interviennent. Sur les quatre dénominations pressenties, deux doivent être adaptées : la rue des Colonisateurs d’une part et la rue des Missionnaires d’autre part. Ces deux adaptations sont liées à l’existence de choix toponymiques dans d’autres communes. L’objectif est d’éviter toute confusion. Il existait déjà une rue coloniale à Watermael-Boitsfort et une rue des Colonies sur le territoire de Bruxelles-ville ainsi qu’une rue des Missionnaires à Anderlecht. 

Le nom du Major Pétillon est choisi en lieu et place de la rue des Colonisateurs, la rue Capitaine Joubert prend la place de la rue des Missionnaires. En 1924, l’ancienne rue de la Centenaire a été renommée rue Général Wangermée car les habitants souhaitaient que la commune lui rende hommage. 

En 1928, le boulevard Général Jacques se substitue au boulevard Militaire.

En 1936, la rue de ma Campagne a changé de nom car celle-ci prêtait à confusion avec le carrefour de « Ma Campagne » (commune de Saint-Gilles). Elle a été divisée en trois tronçons : la rue Général Tombeur, la rue du Ruanda et la rue Général Henry. Ce changement donne lieu à des réactions de citoyens : les uns y sont favorables, les autres hostiles. 

Le square de Broqueville a changé de nom en 1939 pour devenir le square de Léopoldville. Même si Etterbeek a tenté de s’accrocher à ce nom, Woluwe-Saint-Lambert a finalement emporté la bataille (existence de l’avenue de Broqueville dans leur commune). Ces quelques exemples attestent que de nombreux changements sont aussi intervenus dans l’entre-deux-guerres. Les rues portant une empreinte coloniale ne sont donc pas exclusivement des artères nouvellement percées. 

Les archives contiennent différents documents qui montrent le processus d’attribution ou de changement de nom d’une rue, les échanges de correspondance, les biographies des personnalités honorées, des coupures de presse, ... Ces sources historiques permettent de mieux comprendre la logique du moment et les motivations des différents acteurs concernés. 



 

Ensuite, les membres ont pris connaissance de cas spécifiques de noms de rues etterbeekoises à partir des archives existantes, à savoir celle du Baron Charles Tombeur et d’Alphonse Jacques de Dixmude, plus connu sous le nom du Général Jacques. L’objectif était de leur présenter des éléments biographiques sur chacun d’entre eux que nous rapportons ci-dessous :



 

1/Baron Charles Tombeur 



 

  • Né à Liège le 4 mai 1867 et décédé à Bruxelles le 2 décembre 1947

  • École de Guerre

  • Capitaine-commandant de 2e classe de l’État Indépendant du Congo (EIC) (1902)

  • Membre de la Commission des réformes instituées par Léopold II après la Commission d’enquête sur les exactions commises dans l’EIC (1905)

  • Commissaire de district (1907) [...] Inspecteur d’État dans la province du Katanga (1912)

  • Célèbre pour sa victoire à Tabora avec la Force publique (20/09/1916)

  • Vice-Gouverneur du Congo belge (1917-1920)

  • Baron Tombeur de Tabora (1926)



 

2/Baron Alphonse Jacques de Dixmude

  • Né à Stavelot le 24 février 1858 et décédé à Bruxelles le 24 novembre 1928.

  • École de Guerre (1883)

  • Mis à la disposition de l’EIC (1887)

  • 4 séjours successifs au Congo (1887-1890; 1891-1894; 1895-1989; 1902-1905), notamment pour le compte de la Société Antiesclavagiste de Belgique

  • Major (1907) [...], colonel (1914) [...] lieutenant-général (1916)

  • Héros de la PGM pour avoir arrêté la progression de l’armée allemande en 1914 à Dixmude.

  • Baron Jacques de Dixmude (1919)

Le nom de la rue Général Tombeur a été attribué à ce dernier de son vivant. Pour le Général Jacques, il y avait une réelle volonté de lui rendre hommage. La commune d’Etterbeek aligne alors sa décision sur celle de sa consœur ixelloise. C’était à la fois un pionnier du Congo, mais aussi un héros de la Grande Guerre. Ceci étant, une série de questions restent sans réponses : quel était le rôle exact des soldats, quels étaient les conflits auxquels ils ont participé... ?

Trois pistes de réflexion ont été dégagées par les historiens à la suite de cette présentation :

  • Les archives ne permettent pas de résoudre toutes les questions, une approche plus large est nécessaire ;

  • Le volet congolais des deux personnalités doit être davantage exploré ;

  • Il serait intéressant de comparer la situation d’Etterbeek avec d’autres lieux commémoratifs.

Grâce à ces présentations, les membres de la CPM ont eu accès à d’autres sources et ont ainsi pu prendre conscience de la complexité des enjeux liés à l’attribution d’un nom de rue.

 

  1. Le 18 octobre 2022 : Engagement d’un prestataire externe pour faciliter les échanges entre membres de la Commission7

     

Pour la suite de la Commission participative mixte, un partenaire externe visant à gérer la modération des débats et la mise en place du travail débouchant sur des recommandations a été désigné par le Collège des Bourgmestre et Échevins par le biais d’un marché public. Ce prestataire a commencé par donner l’occasion aux participants de partager la manière dont ils vivent l’expérience de faire partie d’une commission mixte et d’exprimer les besoins qu’ils ont. Tous ces éléments ont été notés sur un flipchart (voir PV). Les participants se sont ensuite répartis en sous-groupes afin de répondre aux deux questions suivantes : – Qu’est-ce qui vous a motivé à participer à cette commission ? – Est-ce qu’il y a des éléments dans votre vie qui vous ont influencé/impacté sur votre vision de la colonisation ? 

Avant de passer à la deuxième partie de la séance, Chantal Kesteloot a rappelé quelques faits historiques et expliqué la manière dont l’information présentée avait été collectée. Pour la deuxième partie de cette réunion, les participants ont été invités à suggérer des propositions et des idées sur base des connaissances accumulées et à indiquer les éventuels besoins supplémentaires. 



 

  1. Le 14 décembre 2022 : Premières idées brutes en vue de l’élaboration des recommandations de la CPM8



 

Cette séance avait pour objectif de présenter des ressources et des archives mises à disposition des participants mais également de lancer les premières discussions en groupes de travail sur des mesures à prendre concernant l’espace public à Etterbeek. Ce premier travail (voir pv de la séance) a débouché sur une vingtaine d’idées « brutes » qui constitueront la base de travail future pour l’élaboration des recommandations.



 

  1. Le 15 février 2023 : Présentation de la composition démographique communale et création de quatre groupes de travail 9

À l’occasion de cette première séance en 2023, certains membres de la commission ont demandé à être éclairés sur la composition démographique de la commune afin de mieux comprendre son profil sociologique actuel. Ensuite, les vingt idées de la séance précédente ont été regroupées à travers quatre groupes de travail distincts, à savoir :

  1. Un groupe sur la contextualisation des noms de rues et monuments

  2. Deux groupes sur les actions de sensibilisation…

    1. à travers l’art

    2. à travers des événements/sites web / séminaires/ brochures

  3. Un groupe sur la modification de l’espace public 

L’objectif était ici de créer une dynamique rédactionnelle relative à l’élaboration de futures pré-recommandations. Il est important de noter que les groupes de travail n’ont jamais été figés et qu’un « turnover » a été instauré pour que chacun puisse apporter sa pierre à l’édifice dans chacun des groupes.



 

  1. Le 4 avril 2023 : séance en ligne pour l’audition de deux autres experts10

Après ces travaux, la commission a été saisie d’une demande de différents membres pour qu’une séance supplémentaire soit organisée afin d’y entendre de nouveaux intervenants. L’objectif ? Élargir les perspectives de la CPM en invitant d’autres experts d’horizons divers à un moment crucial avant la formulation finale des recommandations. Deux personnes ont répondu favorablement à cet appel parmi un panel d’experts proposés par certains membres de la commission. Cette séance fut organisée sous forme de vidéoconférence.

Le premier d’entre eux fut M. François Ryckmans, ancien journaliste radio à la RTBF. Auteur d’articles et conférences sur l'Afrique centrale (périodes précoloniale, coloniale et contemporaine). Auteur du livre Mémoires noires. les Congolais racontent le Congo belge, 1940-1960, édition augmentée en 2020. Auteur de la série internet RTBF Congo 1960, il y a soixante ans, du soulèvement de Léopoldville à l'assassinat de Patrice Lumumba (janvier 1959-janvier 1961). Ce dernier rappela les différentes étapes du système colonial qui a débuté avec l’arrivée des Portugais en Afrique en 1483 jusqu’à évoquer plus particulièrement la période du Congo belge qui court de 1910 jusqu’à l’indépendance brutale de 1960 en évoquant le paradoxe suivant lequel le Congo connaissait le taux de salariés masculins le plus élevé d’Afrique centrale (40%) . Mais les Congolais n’étaient jamais associés à la décision politique, soit un des paramètres qui suscita le rejet massif du système colonial. Il s’est aussi exprimé sur les questions de racisme qui trouvent avant tout leur origine dans la traite des noirs et l’esclavagisme qui réduisaient les noirs à des êtres inférieurs, ce qui justifiait leur état inférieur d’esclave. Son témoignage a réussi à apporter un éclairage concret et nuancé sur la période coloniale belge.

La seconde personne fut Madame Carla Mascia, chercheuse au sein du Groupe de recherche sur les relations ethniques, la migration et l'égalité (GERME) de l'Université libre de Bruxelles (ULB). Après avoir été assistante de 2012 à 2019, principalement pour des cours de méthodologie en sciences sociales, elle a assuré la suppléance du cours de Sociologie des Migrations. Elle a été invitée en sa qualité de partie au projet IREP pour exprimer le point de vue des différentes parties à ce projet de co-création sur la représentation du fait colonial entre autres par des œuvres présentes dans l’espace public..



 

  1. Le 18 avril 2023 : explication du concept de toponymie et travaux sur les recommandations11


     

Avant d’entamer la rédaction des recommandations finales, cette séance a d’abord été axée sur les concepts de toponymie et de dialectologie. Ainsi, Madame Kesteloot a pu rapporter ce qui est écrit dans le guide pratique diffusé par la commission royale de toponymie & dialectologie12. Et ce, afin de faire mieux comprendre aux membres de la CPM dans quelle mesure il est possible ou pas d’effectuer des changements de noms de rues et dans quelles conditions. 

Voici un extrait de son intervention, : 

« 1. La préférence doit toujours être donnée aux noms appartenant à la tradition : soit le nom ancien de la rue s’il s’agit d’une rue dont le nom actuel doit être remplacé ; soit le nom usuel s’il s’agit d’une rue sans dénomination officielle ; soit le nom d’un lieu-dit de l’endroit ou du voisinage s’il s’agit d’une rue tout à fait nouvelle. Ce lieu-dit peut être emprunté aux documents cadastraux. Remarque. — Une autre possibilité pour les rues déjà pourvues d’un nom est de choisir un nom en rapport avec l’ancien : rue de l’Église > rue de l’Église Saint Pierre ou rue Saint-Pierre ; place > place de + nom de l’ancienne commune.

2. À défaut de nom traditionnel, on doit préférer en second lieu les noms descriptifs, c’est-à-dire ceux qui partent d’une caractéristique de la rue : le lieu vers lequel elle se dirige; les bâtiments importants qui la bordent ; la forme de la rue (rue Longue) ; la végétation particulière qu’on trouve aux abords ; etc.

3. Sont très bons aussi les noms inspirés de l’histoire et du folklore de la localité.

4. Lorsque ces diverses possibilités sont exclues, on doit bien, surtout dans des quartiers où plusieurs rues nouvelles se créent en même temps, recourir à des noms plus arbitraires, c’est-à-dire sans lien avec la réalité locale. Il faut éviter cependant les notions abstraites, livresques (rue des Gloires nationales, rue de la Tempérance), et préférer des réalités bien concrètes, concernant la nature et la vie quotidienne. Lorsque c’est tout un quartier nouveau qui se crée, il paraît commode de choisir des noms réunis par un thème, par exemple des plantes, des artistes, etc.

  • Remarque générale sur les noms de personnes. — S’il s’agit de personnes décédées depuis plus de cinquante ans, il n’y a normalement aucune objection à formuler.

On n’accepte pas les noms de personnes vivantes, sauf ceux des chefs d’État. Notons que pour les personnes de la famille royale, l’autorisation doit être demandée au Roi par l’intermédiaire du ministre de l’Intérieur.
Quand il s’agit de personnes décédées depuis moins de cinquante ans, il faut s’assurer que leur nom mérite effectivement d’être rappelé, dans cinquante ans et davantage, au souvenir des générations futures, parce que l’œuvre de ces personnes ou leur rôle ont été particulièrement remarquables. Il est, naturellement, difficile d’avoir une opinion ferme dans tous les cas, mais il semble qu’il faille tout au moins :

 

  • 1° Freiner le recours aux noms de personnalités politiques (source unique pour beaucoup de communes) ;

  • 2° Limiter la proportion des noms de personnes (6 sur 6 noms nouveaux, par exemple est excessif) ;

  • 3° Exclure les noms choisis en fonction d’événements, appartenant à la vie privée (comme un centenaire) ;

  • 4° Éviter les noms difficiles à écrire et à prononcer, notamment les noms étrangers dont le système graphique s’écarte du français : Lloyd, Allende. Cela est vrai en dehors des noms de personnes, par exemple le nom d’un régiment anglais ;

  • 5° Éviter les noms prêtant à équivoque ou à dérision. Ceci peut s’appliquer aussi à d’autres déterminants que les noms de personnes. »13



 

Cette séance s’est ensuite focalisée sur la poursuite de la rédaction des recommandations en groupes de travail avant de présenter ces dernières en séance plénière le 30 mai suivant.


 

  1. Le 30 mai 202314

Cette séance avait pour but, de faire un tour de table pour reparcourir en séance plénière les recommandations des quatre groupes de la CPM et de voter sur chacune d’entre elle. Le système de vote proposé par le partenaire externe, Particitiz, dénommé « YourVoiceBox » permet d’éviter un votre simple « pour ou contre » et d’arriver à un résultat plus nuancé. 

Chaque recommandation était soumise au vote et chaque membre pouvait voter de la façon suivante : 

  • Très favorable

  • Favorable 

  • Neutre

  • Défavorable 

  • Très défavorable 

Ce système permet de fournir une grille de lecture claire et fine des résultats des votes. Les résultats de « YourVoiceBox » montrent plus clairement le degré d’adhésion aux différentes recommandations et permet d’identifier les recommandations polarisantes. Toutefois, plusieurs participants ont regretté l’absence de débat sur les recommandations, celles-ci n’ont pas pu être précisées ou clarifiées, de sorte qu’elles ont été soumises au vote sans qu’elles soient délibérées. Aussi, le vote portait sur le titre des recommandations, lesquels ne reflétaient pas toujours la portée de la recommandation. Enfin, certaines personnes ont participé aux votes alors qu’elles n’ont pas assisté à au moins la moitié des réunions et qu’elles n’étaient pas au courant qu’une Dropbox réunissait les PV et les travaux réalisés.



 

  1. Présentation des recommandations

    1. Recommandation 1 : Créer un festival etterbeekois de la décolonisation 15



 

La première recommandation consiste à organiser une journée etterbeekoise de la décolonisation, en l’intégrant dans la quinzaine de la solidarité internationale. L’idée serait de créer un séminaire, des performances artistiques et des expositions ainsi que des activités pédagogiques dédiées aux enfants et étudiants. 

La Commission propose d’y inviter des artistes issus du Congo, du Rwanda et du Burundi, des afro-descendants mais également de proposer à l’échevine de la culture d’intégrer cette thématique à un futur parcours d’artistes. 

Cette recommandation permet l’expression des personnes concernées ainsi que le partage et la sensibilisation entre les Etterbeekois. Elle permettrait une réelle visibilité sur le territoire de la commune.

Il est intéressant d’observer que lors du vote, cette recommandation obtient 18 points. La majorité de la commission ayant donc voté favorablement à cette proposition. 



 

R1

-2

-1

0

1

2

Nbr jetons


 


 

1

6

6

Total

18


 


 


 


 



 



 

Remarques de la Commission

Les membres regrettent de ne pas avoir été informés plus tôt de la mise sur pause du projet IREP. Ils auraient dès lors travaillé davantage sur ce point. 



 

  1. Recommandations 2 et 3 : Contextualiser les actions posées par les personnages dont les rues et des monuments portent le nomet toute trace de l’époque coloniale dans l’espace public etterbeekois16



 

Les deux recommandations ont été formulées comme suit :

Recommandation numéro 2 : 

Contextualiser les actions posées par les personnalités dont les rues et des monuments portent le nom. La commune doit désigner un panel d’experts qui élaborera le cahier de charges (critères à définir) auquel devront répondre les notices portant sur chaque personnage. Les supports seront définis dans le cahier des charges (plaques, sites, brochures,…)

La contextualisation portera aussi sur les caractéristiques du moment, époque à laquelle les noms de rues ont été attribués.

Recommandation numéro 3 : 

Contextualiser les traces de l’époque coloniale dans l’espace public etterbeekois. La Commission préconise les plaques et panneaux explicatifs, les QR codes renvoyant à des contenus multimédias, des brochures, des visites guidées, des événements,...

Ces deux recommandations étant très proches quant à leur contenu, nous proposons de les fusionner dans le présent rapport. 

Elles répondent d’abord parfaitement à l’objectif de la commission. Le travail d’archives déjà réalisé par le projet IREP et par le comité d’accompagnement permettra d’avoir une liste de base17 et des archives précieuses qui permettront la réalisation concrète d’outils de contextualisation.

En outre, cette recommandation permet de trouver un juste milieu en conservant une vraie trace du passé colonial tout en permettant aux différentes générations et aux habitants des quartiers concernés de mieux se familiariser avec l’histoire de leur quartier. Et ce, pour que chaque Etterbeekois puisse se faire sa propre opinion et qu’il puisse ainsi se réapproprier l’espace public. 

Dans la deuxième recommandation, il est mis en avant que le contenu doit aussi apporter un éclairage sur les périodes durant lesquelles les noms ont été choisis. Par exemple, la cité Coquilhat évoquée plus haut vient de fêter son centenaire. 

La troisième recommandation exprime le fait que chaque explication doit être accessible pour l’ensemble du grand public. Dans la recommandation 2, la Commission préconise le recours à des QR codes, des plaques explicatives ou encore des brochures.

Ces deux recommandations ont reçu des votes favorables de la part de la Commission avec un score de 22 pour la deuxième et de 19 pour la troisième. Aucun membre n’y est opposé. 



 

R2

-2

-1

0

1

2

Nbr jetons


 


 


 

4

9

Total

22


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 

R3

-2

-1

0

1

2

Nbr jetons


 


 

2

3

8

Total

19


 


 


 


 



 


 

  1. Recommandation 4: Ajouter aux noms de rues un deuxième nom, officieux, qui reflète les connaissances actuelles sur la colonisation18



 

La proposition de la Commission est de doubler les noms de rues identifiés, par des noms de personnages issus de l’histoire belgo-congolaise. 

Nous pouvons observer ci-dessous qu’il s’agit d’une recommandation avec un score négatif proche de 0 (-1). Il s’agit d’une idée très polarisée qui n’a donc pas été adoptée à la majorité. 

R4

-2

-1

0

1

2

Nbr jetons

2

3

4

2

2

Total

-1


 


 


 


 



 

Les différents commentaires des membres de la Commission montrent en effet cette polarisation. Certains pensent que cela confère un coté touristique, d’autres que c’est une mesure non significative et qui ne change rien au débat, surtout si cela n’est pas contextualisé. De plus, cela pourrait créer un conflit avec des doublons déjà existants.


 

  1. Recommandation no 5 : Changer les noms de rues liés à la décolonisation19



 

Pour quelques membres de la commission, changer le nom des rues représente un acte symbolique et fort. Néanmoins, cette démarche n’est pas si facile à mettre en place pour diverses raisons. La majorité des membres de la commission se sont prononcés contre la réalisation de cette mesure.


 

Ceci étant, certains membres ont souligné le caractère réducteur de l’intitulé de la recommandation qui aurait plutôt dû mettre en avant l’édiction de critères à prendre en compte s’il fallait changer des noms de rue (les actes commis par la personne en fonction de leur contexte, le nombre d’habitants de la rue, les facilités administratives). Par ailleurs, certains estiment qu’il convient également de prendre en compte l’évolution actuelle de la sociologie etterbeekoise qui n’a plus rien à voir avec celle qui a présidé à la période d’urbanisation de la première moitié du XXème siècle.


 

Les membres du comité d’accompagnement ont relevé que changer les noms de rues est compliqué, mais possible, comme expliqué au point 2.5.1.1.


 

Nous pouvons observer dans le tableau suivant que cette recommandation, telle qu’elle a été présentée et soumise aux votes, est également très polarisante. Elle obtient le score le plus négatif avec -4. 


 

R5

-2

-1

0

1

2

Nbr jetons

5

3


 

1

4

Total

-4


 


 


 


 


 

Si une majorité des participants s’est déclaré satisfaite à l’issue du vote, il convient néanmoins d’épingler le regret et la déception d’autres qui estiment que le travail n’a pas conduit à des décisions allant dans le sens d’un véritable changement.



 

  1. Conclusions

Les travaux de la commission participative mixte prennent fin à l’occasion de la rédaction du présent rapport. Il est certain que le déroulé des travaux n’a pas connu un long fleuve tranquille. À plusieurs reprises des avis divergents se sont fait entendre ou clairement sentir. Les membres se sont exprimés en fonction de leur vécu, et de leur état de connaissance. Autant de points de vue très différents qu’il n’était pas toujours évident de concilier. On pointera aussi des tâtonnements d’ordre méthodologique qui n’ont pas toujours permis de mieux cadrer les échanges et d’aboutir à de vrais débats. L’animation de la commission a également connu des changements au cours des travaux. Enfin, les experts eux-mêmes ont exprimé leur malaise lié à un cahier de charge qui ne correspondait sans doute pas aux attentes particulièrement diversifiées des membres de la commission. Cet état de fait s’est traduit par un taux de participation qui a décru au fil des rencontres et qui, aux yeux de certains, pose la question de la force démocratique des recommandations adoptées. 

Une séance d’auditions supplémentaires à la demande des membres tout comme la méthodologie participative portée en fin de parcours de manière très professionnelle par le consultant Particitiz ont permis de retrouver à la fois une certaine sérénité, d’instaurer un climat de dialogue et d’aboutir aux recommandations précitées. Il convient de signaler également qu’un membre de la commission, dans la foulée de ces différentes réflexions, a pris l’initiative d’organiser, avec la bibliothèque communale Hergé, une rencontre littéraire sur le thème des métis coloniaux. Cette soirée a donné la parole à Françoise Thiry, autrice de « La petite valise brune » et à François Milliex, président de l’Association Résolution Métis. Cette soirée illustre la dynamique positive que la commission a aussi suscitée. 

Toujours est-il que les membres, citoyens tirés au sort ou mandataires communaux, se sont investis avec passion et sans à priori. Et cette passion ne facilitait pas toujours le travail, tant celui des animateurs que celui des personnes ressources, Chantal Kesteloot et Romain Landmeters, de la fonctionnaire en charge de la participation, Marie-Charlotte Heldenbergh ou encore de la présidente, Gisèle Mandaila. Tous les membres en étaient bien conscients, ce qui explique les francs remerciements qu’ils leur ont adressés au terme de la dernière séance. 

En conclusion, malgré les écueils méthodologiques inhérents à ce travail qui constitue une première, malgré les échanges passionnés et pas toujours simples tant par la montagne d’informations à assimiler mais également par quelques éléments clivants liés à l’objet d’étude que constitue la décolonisation, la Commission estime avoir collectivement réussi à jeter les bases d’une réflexion quant à la meilleure manière d’agir concrètement sur les témoignages de l’époque coloniale dans l’espace public. Chacun est conscient que ce travail sur le fait colonial ne doit pas se limiter à un cadre politique et juridique mais doit à l’inverse, reposer sur un dialogue auquel doit prendre part la société civile dans le but de poursuivre le développement d’une société plus ouverte, plus tolérante et riche de sa diversité.

Les trois premières séances ont ainsi permis aux membres de se renseigner sur les différentes thématiques et initiatives similaires qui avaient déjà été réalisées. Lors des séances suivantes, les participants ont pu discuter en petits groupes de leurs idées de recommandations. Après le regroupement en trois thématiques à aborder (contextualisation des noms de rues et monuments, actions de sensibilisation, et modification de l’espace public), les membres ont pu aboutir à des pré-recommandations. Lesquelles ont été réanalysées et affinées pour aboutir aux recommandations finales. 

Celles-ci ont ainsi été soumises aux votes alors que certains auraient souhaité un débat en séance plénière. Malgré des questions d’ordre méthodologiques liées entre autres aux titres des recommandations dont certains estiment qu’ils n’en reflétaient pas toujours la portée, les votes des membres de la CPM indiquent un soutien important pour trois des recommandations, à savoir : 

  • Créer un événement thématique et artistique etterbeekois sur la décolonisation et intégrer cette thématique dans une programmation existante, telle que les Parcours d’artistes ou l’Automne des solidarités.

  • Contextualiser les actions posées par les personnages dont les rues et les monuments portent le nom, et ce par l’intermédiaire de différents outils d’informations.

  • Contextualiser les traces de l’époque coloniale dans l’espace public etterbeekois en faisant appel à un panel d’experts qui en rédigeront les contenus à partir des archives qui ont aidé aux travaux de la commission mais en en élargissant le spectre.

Les deux recommandations qui n’ont pas été retenues dans le contexte méthodologique déjà évoqué :

  • Ajouter aux noms de rues un deuxième nom, officieux, qui reflète les connaissances actuelles sur la colonisation.

  • Changer les noms de rues liés à la décolonisation.

Cette expérience pilote initiée par le Conseil communal d’Etterbeek fut une expérience participative enrichissante dont il faut pouvoir tirer tous les enseignements et qui a démontré que sur un sujet aussi symbolique et important, il était possible d’agir et de se comprendre. À l’heure où les clivages apparaissent dans nos sociétés, gageons que le Conseil communal suivra les prémisses des conclusions de cette commission et pourra ainsi confier dans les prochains mois à des experts le soin de poursuivre le travail pédagogique engagé par les membres de la commission mais aussi de confier le soin à d’autres de créer par l’art et la culture une dynamique de sensibilisation pour l’ensemble des Etterbeekois afin qu’ils s’enrichissent davantage de l’histoire de leurs quartiers et de leur commune.

Au terme de ce travail, nous adressons tout particulièrement nos remerciements à Madame Marie-Charlotte Heldenbergh pour l’ampleur de son investissement dans le rassemblement et la mise en forme des éléments qui constituent ce rapport.



 

Michel Bastin

Rapporteur au nom des citoyens

André du Bus

Rapporteur au nom des mandataires